Cette 25ème édition du Tournoi des 6 Nations aura été le théâtre de matchs renversants aux scénarios fous et d’exploits inattendus. Rugbynfo fait aujourd’hui le bilan de la compétition en passant en revue chaque équipe.
L’Irlande comme une évidence
Déjà auréolé d’un Grand Chelem l’an passé, le XV du Trèfle a confirmé son statut d’ultra favori. Avec 4 victoires et 1 défaite, le bilan est forcément très positif pour les hommes d’Andy Farrell. Surtout que l’on se demandait si la cruelle défaite en quarts de finale de la Coupe du Monde contre les All Blacks allait avoir un impact sur leurs performances. De plus, le maître à jouer aux 118 sélections Jonathan Sexton a tiré sa révérence à l’automne, laissant un grand vide au poste de demi d’ouverture.
Finalement, le jeune et prometteur Jack Crowley (24 ans) aura balayé les doutes d’un revers de la main en s’imposant comme le nouveau dépositaire du jeu irlandais. Il lui reste néanmoins à progresser face aux perches. Cependant, Andy Farrell ne doit pas être pleinement satisfait du rendu de son équipe. Les 3 premiers match se sont avérés très aboutis avec des succès probants en France (38-17) et contre l’Italie et Galles (36-0 et 31-7). Lancée sur la route vers un double Grand Chelem inédit, les Verts se sont cassés les dents à Twickenham, dominés par la folle intensité anglaise et crucifiés par un drop de Marcus Smith sur le gong. Le dernier match contre l’Écosse ne laissera pas un grand souvenir, la faute à un manque d’efficacité inhabituel. En tout cas, l’essentiel est assuré et l’Irlande continue de s’imposer, et de loin, comme la meilleure nation européenne.
La France souffle le chaud et le froid
Attendue au tournant après la terrible désillusion subie à domicile en Octobre dernier en quarts de finale, l’équipe de France a alterné le bon et le moins bon cet hiver. En effet, Fabien Galthié et son nouveau staff ont vécu une entrée en matière délicate avec une claque reçue à Marseille par l’Irlande. Le second match en Écosse, gagné miraculeusement 20-16 grâce notamment à un exploit de Bielle-Biarrey, n’a pas effacé les doutes. Certains cadres ont d’abord semblé en dedans, parfois à court de rythme ou sans solutions dans le jeu courant.
Par la suite, le pire a été évité par un poteau salvateur à Lille. Pour la première fois de l’histoire du Tournoi des 6 Nations, l’Italie n’a pas perdu sur le sol français, ramenant un résultat nul 13-13 amplement mérité. Lors de cette partie, l’équipe entière a paru amorphe, sans idées, rappelant les années sombres vécues au cœur de la décennie précédente. Le révolte a finalement eu lieu à Cardiff, dans une ambiance incandescente, amorcée par des changements attendus. Le centre Nicolas Depoortère, l’arrière Léo Barré et le surpuissant deuxième-ligne Emmanuel Meafou ont amené de la fraicheur au sein du groupe. La victoire 45-24 a rassuré les supporters, avec un Nolann Le Garrec plein de promesses à la baguette du jeu.
Le bouquet final a eu lieu à Lyon, avec un Crunch passionnant. Là encore, les Bleus ont parfois été inspirés, inscrivant de beaux essais en contre. D’un autre côté, ils ont continué à se montrer perméables défensivement en encaissant plus de 3 essais pour la 3ème fois du tournoi. Désormais, un nouvel élan est créé, et pour retrouver un niveau semblable à celui du mandat précédent, il faudra progresser et continuer de grandir.
L’Angleterre vers le renouveau
Après avoir terminé sur le podium lors de la Coupe du Monde, on attendait un tournoi de la confirmation pour le XV de la Rose. Et même si nous n’avons pas retrouvé la constance et l’efficacité de l’équipe finaliste du Mondial 2019, force est de constater qu’elle est de retour et semble avoir « mangé son pain noir ». Deux courtes victoires décrochées à Rome (27-24) et contre les Gallois à Londres (16-14) ont permis de mettre en exergue les qualités de certains nouveaux cadres tels que Ben Earl, devenu un numéro 8 saignant. On peut aussi ajouter Alex Mitchell qui s’impose comme le demi de mêlée du futur ou Ollie Chessum, qui a pris une véritable dimension et l’ailier Tommy Freeman, décisif plusieurs fois.
En revanche, pour la 4ème fois consécutive, les joueurs de Steve Borthwick se sont inclinés contre le rival écossais, au terme d’une rencontre manquée qui aura mis en évidence des fragilités défensives. Il faut toutefois souligner que le meilleur match du tournoi a eu lieu à Twickenham contre l’Irlande, avec des hommes en blanc affamés, menés par Earl et le redoutable Ollie Lawrence, sans doute l’un des meilleurs joueurs anglais du tournoi. L’espoir de victoire finale dans ce tournoi a donc été entretenu par ce succès in extremis. Mais c’est bien les Français qui auront le dernier mot et volent la place de dauphin à leur éternel rival.
L’Écosse déçoit encore
En nette progression depuis plusieurs saisons, le XV de Chardon avait pour ambition de boxer avec les meilleurs et de concurrencer l’Irlande en ce début d’année. La victoire inaugurale au Pays de Galles 27-26 avec une impressionnante première mi-temps fut pleine de promesses mais le retour sur terre s’est avéré brutal. Au bout d’un match tendu et serré, les Calédoniens ont vu leurs rêves de victoire finale dans ce tournoi s’envoler.
La suite de la compétition fut en dents de scie, à l’image des performances de l’équipe. D’abord une victoire prestigieuse contre l’ennemi anglais dans un Murrayfield bouillant grâce à un triplé du facteur X Duhan Van Der Merwe. Ensuite, deux courts revers pleins de déception, alors qu’on attendait mieux des hommes de Gregor Townsend. Le premier en Italie (29-31) a continué de mettre en avant l’irrégularité du groupe, souvent accroché aux performances de son maître à jouer Finn Russell. Enfin, dans un match pour bien figurer, l’Écosse n’est pas passée loin de réaliser un exploit à Dublin pour gâcher la fête. En bref, on attend toujours un tournoi référence pour cette nation au jeu ambitieux et aux talents rares.
L’Italie marque l’histoire
Quel tournoi de la part des Transalpins ! Le mandat de Gonzalo Quesada commence sous les meilleurs auspices. Effectivement, l’Italie vient de réaliser le meilleur Tournoi des 6 Nations de son histoire. Pour la première fois, elle n’a pas perdu plus de 2 matchs. Pourtant mal embarquée avec 2 défaites inaugurales (24-27 contre l’Angleterre et 0-36 en Irlande), la Squadra Azzurra a redressé la barre. La patte du nouveau sélectionneur s’est rapidement faite ressentir, avec notamment une rigueur défensive qui avait manqué lors du Mondial cet automne.
L’historique match nul décroché en fin de match en France a servi de déclic. Malgré la pénalité manquée sur la sirène par Paolo Garbisi, les Italiens se sont servis de ce match fondateur pour confirmer en faisant tomber l’Écosse. Ainsi, les hommes de Quesada brisent une malédiction qui les suivait depuis 2013 et une victoire face à l’Irlande en gagnant à domicile. Une fois la cuillère de bois évitée, comme en 2022, ils ont réédité en s’imposant à Cardiff pour la 2ème fois en 2 ans 24-21. Par la même occasion, ils infligent aux Gallois leur 5ème défaite du Tournoi, et leur « lèguent » par conséquent le fameux trophée. Un tournoi de records que les supporters transalpins ne sont pas prêts d’oublier. Désormais, la Squadra Azzurra doit confirmer son nouveau cycle lors des prochaines tournées.
Le Pays de Galles au plus bas
Depuis désormais plusieurs saisons, le XV du Poireau vit une situation difficile. Hors du terrain, une crise financière a eu lieu ainsi que des problèmes internes à la Fédération. Sportivement, la dernière Coupe du Monde a été plutôt réussie avec un quart de finale après un Tournoi manqué. Le retour de Warren Gatland aux manettes avait, semble-t-il, fait du bien aux troupes avec l’émergence de nouveaux jeunes leaders. En effet, on peut citer le nouveau capitaine Dafydd Jenkins (21 ans et à peine 17 sélections) ou Jac Morgan, étincelant troisième-ligne, malheureusement blessé cet hiver.
Le premier bloc du tournoi s’est avéré cruel, avec 2 courtes défaites contre l’Écosse et l’Angleterre (26-27 et 14-16). Ensuite, un lourd revers subi en Irlande (31-7) a continué de saper le moral des Dragons rouges. Les 2 réceptions finales d’une France moribonde et d’une Italie prenable sonnaient alors comme une bonne occasion de redorer le blason. Il n’en sera rien, les coéquipiers de George North étant défaits par deux fois, sans donner l’impression de pouvoir vraiment renverser la vapeur. La reconstruction galloise est lente, et pour effacer ce Tournoi manqué à 0 victoires pour la première fois depuis 2003, il faudra s’appuyer sur une jeunesse flamboyante. Elle est symbolisée par les joueurs cités plus haut mais également l’ailier Rio Dyer ou le remuant arrière Cameron Winnett.